Lek & Sowat /// « Peintures Sacrificielles » – Dédale, Vannes

Par Alain , 12 novembre 2021

L’impression d’un chantier à l’abandon où se percutent les vrais-faux graffitis, les installations inachevées ou les essais de matières et de couleurs … pour l’ illusion parfaite d’un local vandalisé ! Magie de la création …

 

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

Peintures Techniques utilisées dans l’industrie aéronautique pour révéler, à mesure qu’elles se consument, l’intégrité physique des turbines d’un moteur. Pour leur participation à Dédale, Lek & Sowat ont choisi de rejouer leur passage d’artistes urbains de l’extérieur vers l’intérieur, de la rue vers l’atelier, de l’éphémère vers le pérenne. Dans cette grande pièce, les deux artistes donnent l’illusion d’avoir passé de longs mois en résidence sur site, à travailler sur des tableaux monumentaux inachevés. Les murs, les sols, les plafonds, chaque surface est patinée par les différentes strates de leurs expériences picturales. Les couches de peintures successives se superposent, se recouvrent et s’éliminent, formant des flaques d’aquarelles au gré du sol. Comme s’ils avaient été fabriqués à partir de cloisons de murs désossés, des cadres en rails de placoplâtre rythment l’espace, créant de nouvelles perspectives dans la pièce. Ils semblent en attente de larges toiles. Lek & Sowat viennent tout juste de partir, à la hâte. Leur atelier est laissé tel quel, leur outils, matériaux et vêtements sont posés çà et là, en désordre. On découvre alors un processus de création alchimique, au fil de murs marbrés de peintures acryliques. Des tests de couleurs et d’effets de matières se mêlent à des écritures et des calligraphies anciennes déstructurées, ainsi qu’à une architecture en volume. « Quand on a commencé à travailler ensemble en atelier, au début, c’était plus difficile que le travail en extérieur.

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

Il a fallu se réinventer », raconte Sowat. « On devait trouver de nouvelles manières de transposer en intérieur ce qui d’habitude est voué à disparaître dehors », rajoute Lek. La destruction se situe alors au centre de leur propos artistique. Ils dessinent et effacent leurs œuvres d’atelier dans un même geste, jouent avec la notion d’érosion et d’usure du temps, à l’image de ces graffitis fantômes à moitié frottés, nettoyés, abîmés que l’on trouve un peu partout sur la surface des villes. Lek & Sowat ont choisi un code couleur primaire, clin d’œil à l’ADN du graffiti des années 80. « C’est tout ce qu’il y avait à l’époque. Une douzaine de couleurs en bombe, maximum », se souvient Lek. Des aérosols qui servaient à repeindre des voitures ou des meubles. « Ces couleurs d’origines, le bleu que nous avons choisi pour le fond et les motifs répétitifs rappellent une chambre d’enfant, comme si une petite fille ou un petit garçon avait librement maculé ses murs d’écritures et de taches de peintures », complète Sowat. « C’est avec cette enfance de l’art que nous cherchons à renouer lorsque nous travaillons en intérieur. Faire confiance à sa main, à l’intuition plus qu’à l’intellect ». Des peintures accidentelles jonchent le sol, comme dans un atelier de carrosserie. « Ces peintures fortuites que nous observions sur le sol des lieux abandonnés que nous avons visité pendant des années deviennent ici le moteur de notre esthétique », reconnaît Lek. Dans ce décor, tout est sacrifié. Les œuvres qui ne pourront être prélevées de leurs murs d’origines, les cadres de toiles trop grands pour pouvoir être sortis par la porte ou les fenêtres de la pièce… A terme, tout sera amené à disparaître. Comme pour Dédale, dont un jour, il ne restera rien…

Texte : Violaine Pondard
Photos : Sébastien Le Gourriérec
Plus sur les artistes :    @sowat_dmv   @Lek____75019
et sur DéDalE : dedale.lartprendlarue.org/
lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

lek - sowat - street art - dedale - vannes - france

Lek & Sowat, Dédale RDC#2, Vannes // Photo 2020 © Sébastien Le Gourriérec

°°°°°°°°

Duo d’artistes depuis 2010, Lek & Sowat partagent le même goût pour la spontanéité du graffiti, l’adrénaline de l’exploration urbaine et la rigueur du travail de création en atelier. Entre expérimentations in situ, installations et architectures abstraites, ils développent une nouvelle forme de land art urbain. Après avoir organisé le projet « Mausolée », une résidence artistique clandestine dans un centre commercial abandonné, les portes du Palais de Tokyo leur sont ouvertes en 2012 pour une exposition expérimentale dans les issues de secours du bâtiment intitulée « Terrains Vagues », acte fondateur du Lasco Project. En 2015-2016, ils sont pensionnaires de la Villa Médicis à Rome, multiplient les collaborations avec les stylistes Agnès b. ou Jean-Charles de Castelbajac, ainsi qu’avec des pionniers du graffiti, comme Jonone, Mode2, Futura ou Jacques Villeglé. Fin 2019, répondant à l’invitation de Sophie Duplaix, conservatrice en chef du Centre Pompidou, ils couvrent 280 mètres de palissades anti-graffitis posées devant Beaubourg le temps des travaux de rénovations. Leur œuvre en forme de clin d’œil « J’aurais voulu être un artiste » est peinte à l’aide de bombes aérosol noires et de pochoirs.