Mr. Sad /// « Tu dois être heureux », La Havane, Cuba

Par Alain , 7 janvier 2025

Un message politique qui ne dit pas son nom, un citoyen qui se fait artiste de rue, un mantra pour interpeler les passants et réveiller la société ?  Ca se passe à la Havane, sur les murs décrépis de la capitale cubaine.

 

Cela fait déjà plus d’un an qu’un graffiti se répand sur les murs et les vitrines de La Havane: ni dessin léché, ni peinture travaillée, mais un simple message, comme griffonné à la hâte, au stylo, à la bombe, à la peinture, parfois à l’aide d’un pochoir. Et plus rarement en lettrage 3D.

Sous le nom de Mr. Sad, le graffeur de 27 ans inscrit toujours la même phrase: « Necesitas ser feliz » (Tu dois être heureux). Un message assez innocent en apparence, mais qui ouvre un champ d’introspection pour les passants, voire d’inspiration pour d’autres créateurs, dans un style plutôt comminatoire qui interroge à coup sûr … !

65 ans après la révolution castriste – l’artiste (qui se dit sociologue) analyse que les slogans tels que « La patrie ou la mort, nous vaincrons » ont peu à peu perdu leur sens, de génération en génération. Cependant, éducation oblige, les Cubains sont tellement habitués aux ordres « que seul un ordre peut attirer l’attention ». D’où l’utilisation de cet « impératif, un ordre mais aimable ». Ce message résonne dans la société cubaine tellement verrouillée et qui souffre en plus, depuis la crise du Covid, d’une situation économique catastrophique, la population manquant de multiples denrées et subissant de fréquentes coupures d’eau et d’électricité.

Selon Mr. Sad, son intention consiste à « créer un miroir pour que les gens aient l’opportunité de prendre un moment pour voir ce qu’il y a en eux ». Il aurait reçu, via les réseaux sociaux, de nombreux témoignages de personnes ayant pris des décisions concernant leur vie personnelle: fuir des violences domestiques, aborder les questions d’identité, de genre, renoncer au suicide… Les cubains sont aussi invités à déposer sur les réseaux sociaux leurs photos lorsqu’ils le voient.

Pour l’heure Mr. Sad qui œuvre sous anonymat, mais en plein jour et à visage découvert, continue de multiplier ses mantras, mais pour combien de temps ?

Texte : Alain  (d’après AFP)
Photos : Yamil Lage / AFP

Plus sur l’artiste : ???

 

 

---