Biographie de WAR!

WAR! est un artiste en guerre pour le vivant. Il nous ouvre les yeux sur la beauté d’un monde à portée de regard, mais que nous ne voyons plus. Dans la métropole rennaise, on reconnaît son style, mais on ne connaît pas son visage. WAR! a choisi d’être anonyme. 

 

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Portrait de War! par Aero, La Courrouze, Rennes, France // Photo juil 2020 © A.-C. Jaouen

Street artiste masqué

Vieille veste militaire, foulard noir sur tête, lunettes d’aviateur opaques : voilà pour l’accoutrement. Une recherche sur le web donne quelques informations, mais rien sur son identité.

WAR! fait le choix d’avancer masqué. Comme nombre de ses congénères noctambules, il préfère circuler incognito dans une ville soumise à la vidéo surveillance et à de potentiels contrôles de police. Plus jeune, il est arrêté pour avoir réalisé un lettrage à l’arrière d’une station-service. Un client l’a dénoncé. À la gendarmerie, son père refuse de signer la déposition : le terme « dégradation » ne lui convient pas. La leçon est apprise : pour s’approprier l’espace urbain, il doit se camoufler. Des publicitaires à visage découvert nous font avaler mille promesses au format 4×3 sur nos trajets quotidiens. Mais les street-artistes ont un pouvoir subversif que les annonceurs n’ont pas. Dont acte. 

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War!, « Tourteau », Base sous-marine, Lorient, France // Photo août 2016 © A.-C. Jaouen

Hors-la-loi autodidacte

WAR! grandit à la campagne dans les années 1980. Dès l’adolescence, il s’éloigne des cœurs de ville et hante les friches urbaines. Il préfère le calme à l’agitation, l’introspection au brouhaha continu des rues trop fréquentées. L’idée d’intégrer une école d’art ne lui vient pas. Il ne réalise pas que la peinture ou le dessin peuvent nourrir un homme. L’art urbain n’est pas encore reconnu comme une forme d’expression noble. Peut-être ne mesure-t-il pas son talent. Mais sa passion ne le lâche pas. Alors il bricole, il teste différents outils, il expérimente et se perfectionne. Il progresse avec les moyens du bord, sans le beurre dans les épinards.

En 2009, il débarque à Rennes. La ville est en pleine expansion. Les vieilles maisons avec jardin laissent la place aux immeubles et la skyline rennaise est ponctuée de grues. De nouveaux quartiers voient le jour et la nature cède du terrain.  

WAR! teste la perche télescopique au bout de laquelle il attache un rouleau de peinture. Son outil lui fait prendre de la hauteur. Il atteint des zones inaccessibles aux autres graffeurs. 

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War!, « Coquelicots », Cesson-Sévigné, France // Photo juil 2020 © A.-C. Jaouen

Un coquelicot apparaît dans la rue Saint-Hélier. Une longue tige noire soutient des pétales rouge vif. Il fait plusieurs mètres de hauteur et la façade est visible de loin. C’est une de ses œuvres les plus anciennes et elle n’est toujours pas effacée.

En 2019, il travaille sur un chantier de la Courrouze, devant un public tenu à distance. Il évolue à l’aveugle à cause de la hauteur et de l’obscurité. Ses coups de perche semblent donnés au hasard, pourtant les traces se mélangent, s’additionnent et des formes apparaissent peu à peu. Avec son procédé d’artisan peintre de l’extrême, il est un artiste iconoclaste.

Graffeur en guerre pour le vivant

Le pseudo de WAR! lui vient de Bob Marley et de sa musique rebelle. C’est un cri de guerre contre l’injustice : celle des hommes contre d’autres hommes, celle des hommes contre le vivant. 

Sa principale source d’inspiration est la nature. Il peint des phrases, mais surtout des plantes, des fleurs, des mammifères, beaucoup d’oiseaux. Il nous montre ce que nous avons perdu de vue et replace le vivant où il devrait être. 

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War!, « Séquoia », Rennes, France // Photo août 2022 © A.-C. Jaouen

Il essaime ses grands formats là où il trouve de l’espace : des œillets à l’aéroport de Saint-Jacques, une hermine à l’entrée des prairies Saint-Martin, un piranha sur les bords de Vilaine, etc. 

« Je sème des graines dans le béton de notre époque » WAR! 

La cohabitation avec le vivant est impossible là où la nature n’a plus de place. La faune est bannie, la flore domestiquée. Rennes offre un environnement privilégié à ses résidents. Mais l’environnement n’est pas le vivant. 

En 2019, l’artiste rennais se rend dans la zone industrielle sud-est. Des centaines de réfugiés y squattent un entrepôt. Il recouvre la façade d’une autruche géante qui a la tête plongée dans le sol. Le volatile n’est pas choisi au hasard : il est la métaphore de l’abandon des exilés par les autorités. Eux aussi méritent notre attention.
Il étend ses explorations et on le laisse faire. Les Rennais reconnaissent ses peintures et ils en redemandent. Les équipes de nettoyage passent leur chemin. L’ex-délinquant devient une valeur ajoutée dans le grand ouest.

WAR! à la mode ?

WAR! a le vent en poupe. Il expose plusieurs fois dans la métropole, à Paris aussi. Il vend des œuvres sur toile ou cartons à ceux qui peuvent se les offrir. Des reproductions haute qualité sont sold out sur son site. Les commandes publiques se multiplient. Aujourd’hui, il est partout. Jamais toyé, sans cesse instagrammé. Serait-il devenu un street artiste d’arrière-garde ? Non, l’armistice n’est pas signé.

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War!, « Etourneau », Rennes, France // Photo juil. 2020 © A.-C. Jaouen

En résidence aux 3CHA de Châteaugiron, il accroche une horloge de l’apocalypse au-dessus de son campement et nous rappelle que nous sommes des pompiers pyromanes. Ses peintures et installations aux Urbanistes de Fougères soulignent notre domination macabre sur le monde animal. Sur les piliers de la ligne B du métro, un pissenlit en stop-motion anticipe qu’on ne dissout pas un soulèvement. Il en appelle à Geronimo pour défendre un bois menacé par l’implantation de panneaux voltaïques à Luitré-Dompierre.
La lutte continue !

« Quand le dernier arbre aura été abattu, quand la dernière rivière aura été empoisonnée, quand le dernier poisson aura été péché, alors on saura que l’argent ne se mange pas » [Geronimo]

WAR! a réussi à se faire adopter par les Rennais. Il est parvenu à réenchanter la ville avec son bestiaire et ses fleurs XXL. Comme l’homme préhistorique dans sa caverne, il a imprimé sur les murs les éléments essentiels à nos vies d’humains déracinés. Espérons que la balade se poursuive encore longtemps et qu’il continue de semer ses graines à la volée. 

Biographie rédigée par A.-C. Jaouen

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Découvrez les œuvres de WAR! sur
Street-art-avenue

Site officiel : warindawest.com

Instagram : warindawest

Site d’Alain Amet : WAR!

Conférence TEDx 2017 

À télécharger : la carte des œuvres de WAR! à Rennes